« La théorie de l’âme soeur, notre jumeau parfait, notre part manquante,
est née dans l’univers des kabbalistes entre le XIIIe et le XVIe
siècle, avant de traverser continents et siècles, affirme Tobie Nathan.
Le Dieu biblique fabrique les âmes par couples. Quand un mâle est créé,
sa partenaire féminine l’est en même temps que lui. Il ne s’agit pas
forcément d’un homme et d’une femme, mais aussi de deux hommes ou de
deux femmes, car la partie mâle peut se trouver dans une femme et
inversement. Il faut penser en termes d’émetteur (mâle) et de récepteur
(femelle). »
Il y a deux jours, j'ai passé 5 heures au téléphone avec l'une de mes cousines. Elle a d'ailleurs le chic de m'appeler à minuit ! Cousine a 20 ans de plus que moi. Nous nous voyons que très rarement, nous nous téléphonions que très rarement, mais à chaque appel, nous rattrapons tout ce temps perdu. Nous rions surtout beaucoup ensemble, nous nous charrions aussi énormément, et en même temps il est bon d'avoir quelqu'un dans la famille avec qui parler le même langage.
A peu de chose près, nous portons le même regard sur la vie et notre rapport au monde se ressemble. Nous observons beaucoup, nous analysons, nous avons aussi ce regard optimiste sur la vie, sur les choses, avec un cheminement spirituel. Sur certains point, elle a quand même bien plus de maturité que moi (oui faut dire c'est 20 ans de plus qu'elle a !) et d'un autre côté, je ne ressens pas cette différence d'âge.
Mes frères, qui travaillent avec elle, me disent souvent que Cousine adore parler avec moi, car je lui transmets de l'énergie positive. A vrai dire, je pourrais dire la même chose pour elle. Abordant les difficultés qu'elle a rencontré dernièrement dans son entreprise, et des conflits entre ses salariés, je me suis vue à imaginer aller observer... Et tout en plaisantant, moi en me proposant, elle en m'accueillant dans son entreprise, j'ai fini par lui poser une vraie question.
"Penses-tu qu'on pourrait s'entendre au travail ?"
A cela, elle m'évoque que depuis toutes ces années de carrière, elle a rencontré une seule fois son âme-sœur. Celle avec qui elle s'éclatait et faisait un travail remarquable. Celle avec qui elle a vécu les plus belles années de sa carrière. Elle me racontait comment cela "matchait" (du verbe to match, en anglais, qui a pour signification de coller ensemble, d'être compatible) entre elles.
Et pendant qu'elle me racontait sa relation avec son âme-sœur professionnelle, des images de ma collègue Flo se dessinait. Cela vibrait en moi comme une évidence. Je sais que Flo me lit régulièrement. Je ne sais pas si ça va lui parler... mais cela me parle. Quand je repense à notre relation professionnelle... c'est vrai qu'entre elle et moi ça a matché de suite !
Flo est arrivée fin décembre 2015. A peine arrivée, s'ensuivent les congés, elle était sensée travailler en binôme avec moi, mais je l'abandonne 2 semaines dès son arrivée pour mon voyage dans le pays natal de mes parents, le Laos. A peine rentrée, de retour au travail, je prends la température et lui demande comment cela s'est passé pour elle en mon absence. Et l'accompagnement auprès des enfants commencent. Nous suivons le fil des journées comme si nous avons toujours travailler ensemble. A aucun moment avec elle, je n'ai eu à chercher à m'accorder, à m'ajuster, à comprendre notre relation. Car cela s'est fait naturellement. Nous partageons ensemble nos idées, nous tentons, et à chaque réussite, c'est l'éclat de joie ! L'émerveillement, la fierté d'avoir réussi à permettre à l'enfant d'évoluer, de progresser ! Il est rare, il faut le dire, qu'on soit en désaccord. Ou du moins, on discute, on réfléchit et on avance ensemble. Comme avec Cousine, on parle le même langage, on donne quasiment le même sens à ce que l'on désire proposer aux enfants.
Lors de l'annonce de la fermeture du service, Flo et moi sommes allées au front. Ensemble. Notre relation se vit dans une forme de complémentarité. Elle amène ses espoirs, ses envies, ses rêves, je l'accompagne et réfléchis à la stratégie avec elle. Elle est la machine et moi je mets les pièces... En cas de coup dur, Flo a cette sacré capacité à me faire prendre du recul. Jamais dans le jugement. Toujours dans l'empathie. Pendant cette période, on a refait le monde à notre image. Rêvé de ce qu'il est possible. On rit, on plane, on stresse et on pleure ensemble. C'est de cela dont j'ai peut-être le plus de mal à me séparer. Notre binôme est une force au quotidien.
Se rajoute à notre binôme, la cheffe de service. Humaine. Accueillante. Empathique. Avec qui aussi, la relation est simple, basée sur une confiance mutuelle. Avec qui il est possible de tout dire, même de ses "ratés", dans le respect, avec qui il est possible de penser, réfléchir, avancer ensemble. Cheffe parle de nous comme un trinôme qui matchait bien ensemble. C'est cela que je vais regretter. La simplicité, l'aisance et la fluidité de ces deux relations de travail.
Je parle au présent et non au passé. C'est intentionnel. Parce que pour moi, cette relation triangulaire vibre en moi. Suite à la discussion avec Cousine, cette évidence est apparue. Pourtant ce n'est pas faute d'avoir déjà, et à plusieurs reprises, évoqué avec Flo comment nous nous complétons au travail. Mais je ressentais le besoin de laisser trace de cette expérience humaine.
Cousine m'avait demandé si j'aimais mon travail. Et l'évidence était là. J'aime mon métier. Mais ce que j'aime par-dessus tout ce sont mes collègues de travail. Du travail, j'en retrouverai toujours, pour le reste, c'est moins certains.
Alors j'avais envie de rendre hommage à mon âme-sœur Flo et ma cheffe de service ! Je vous aime !
Ju'